Aristote arrive à Athènes à l’âge de 17 ans, venant de Macédoine, et entre à l’Académie, l’école que Platon a fondée en 387 av. J.C., trois ans avant la naissance d’Aristote. Celui-ci collabore activement à l’enseignement au sein de l’Académie et publie ses premiers dialogues, une vingtaine selon les biographes antiques, tous perdus aujourd’hui. Platon lui aurait confié la charge des cours de rhétorique. Vingt ans durant, Aristote est l’un des plus brillants disciples de Platon, son aîné de plus de quarante ans. Mais en 347, Platon meurt et transmet la direction de l’Académie à son neveu Speusippe. La même année, Aristote est envoyé en Troade où il devient le conseiller politique et l’ami du tyran Hermias d’Atarnée. Il y ouvre une école et entreprend des recherches biologiques. Plus de dix ans plus tard, lorsque son élève Alexandre succède à son père Philippe de Macédoine, Aristote retourne à Athènes, et c’est alors qu’il fonde le Lycée ou Péripatos, sorte de péristyle où l’on philosophe en marchant, école qui deviendra par la suite une concurrente de l’Académie platonicienne. Pendant treize ans, Aristote y développe son enseignement.
Une célèbre fresque de Raphaël intitulée L’École d’Athènes (1508-1512) montre en son centre Platon et Aristote marchant côte à côte, Platon levant son index vers le ciel et Aristote abaissant sa main vers la terre. Les livres qu’ils portent ne sont pas le fait du hasard non plus. Pour Platon c’est le Timée, un de ses dialogues les plus métaphysiques relatant l’origine de l’univers, alors qu’Aristote a en main l’Éthique, ouvrage traitant des vertus humaines, du bonheur et des voies les meilleures pour l’atteindre. Cette fresque de la Renaissance confirme qu’à cette époque on oppose volontiers les deux grands maîtres. Cette opposition s’est consolidée au fil des siècles, car de son vivant, Aristote avait critiqué certaines positions de son maître. Encore aujourd’hui, Platon est souvent considéré comme le philosophe de l’abstraction métaphysique, celui du monde supérieur des idées et son disciple Aristote, comme le penseur encyclopédique qui aurait fait redescendre la philosophie sur Terre.
La position d’Aristote à l’égard du platonisme est en réalité plus complexe. Certains philosophes néoplatoniciens considéraient que Platon et Aristote étaient d’accord sur l’essentiel. Cependant Aristote fut amené par le développement de sa pensée à prendre à maintes reprises une attitude opposée à celle de son maître, mais rien ne nous permet de dire qu’un grave différend se soit élevé entre les deux philosophes ; nous avons la preuve qu’Aristote a toujours conservé de son maître un souvenir reconnaissant. Aristote déclare dans l’Éthique à Nicomaque que si l’amitié et la vérité lui sont chères l’une et l’autre, il doit cependant préférer la seconde à la première. Comprenons que sans cesser d’être l’ami de Platon, il se voulait aussi au service de la vérité en s’opposant à lui.