L’idée centrale de la psychologie évolutionniste est facile à résumer : « La nature humaine existe. » Contrairement à ce qu’affirment les sciences humaines depuis un siècle : l’être humain est en partie façonné par des instincts forgés par l’évolution. Ces instincts ne se réduisent pas à quelques pulsions de base mais à ce que l’on nomme les trois F : « food, fight and fornication » (nourriture, agressivité et sexualité). Ils s’étendent à toute une gamme de pulsions complexes : instincts parentaux, langage, sens moral, goût esthétique, racisme, capacités de raisonnement et même la croyance en Dieu !
L’acte officiel de naissance de la psychologie évolutionniste remonte à vingt ans. En 1992, un article d’un couple d’universitaires en pose les principes 1. Leda Cosmides (psychologue) et John Tooby (anthropologue) s’en prennent au « modèle standard des sciences sociales » (ou MSSS) qui repose sur un mythe fondateur : la théorie de la « cire molle » qui voit dans l’être humain uniquement un être de culture. Pour nos deux auteurs, la découverte des capacités précoces des nourrissons (l’aptitude des bébés à catégoriser, à faire des inférences, à discerner les éléments du langage) montre que le petit humain est déjà équipé à la naissance de tout un outillage mental qui lui permettra d’entrer dans la vie d’humain.
Trois ans plus tard, en 1994, Steven Pinker, de l’université de Harvard publie L’Instinct du langage. Le livre fait grand bruit. L’auteur, jeune linguiste de Harvard et élève de Noam Chomsky, tentait de démontrer que si les langues (l’anglais, le chinois, l’hindi, etc.) sont bien des inventions culturelles, apprises par leurs locuteurs, la capacité à se les approprier suppose des compétences linguistiques innées. Aux sources du langage, il y a donc une « nature humaine », faite de compétences innées propres aux humains : la culture ne fait que se greffer sur ce socle naturel.