L'énigme de l'autisme : nouvelles pistes

Les recherches sur l'autisme se développent autour de trois grands objets : les anomalies du développement cérébral ; l'incapacité à distinguer les personnes et les objets ; l'expression envahissante de certaines aptitudes intellectuelles...

L'autisme bouscule nos connaissances sur le développement de l'intelligence. Les enfants autistes présentent une étonnante hétérogénéité de compétences. S'ils sont peu armés pour les relations sociales, leur intérêt pour les objets physiques semble en revanche préservé et parfois même à l'origine de capacités exceptionnelles (mémoire visuelle, relations spatiales, etc.).

En trente ans, l'analyse psychologique et neurologique du développement de l'intelligence sociale chez les enfants autistes a permis un enrichissement sensible de nos connaissances dans ce domaine. L'on peut dire que les recherches sur l'autisme ont progressé en suivant globalement, trois directions principales.

Des processus cognitifs affectés ?

La première de ces approches part du principe que l'être humain est biologiquement programmé pour pouvoir nouer rapidement des relations sociales, grâce à des processus cognitifs spécialisés, conçus en termes de modules, auxquels les chercheurs tentent de faire correspondre des zones cérébrales précises. Dans l'autisme, une anomalie précoce du développement cérébral affecterait la maturation de certains de ces modules, et serait responsable de l'ensemble des anomalies du tableau autistique.

L'une des premières pistes explorées selon cette théorie modulaire concerne un dysfonctionnement spécifique du langage chez les personnes autistes. Ainsi les zones de l'hémisphère gauche consacrées au langage ont été les cibles des premières études visant à identifier des anomalies cérébrales dans l'autisme. Or les travaux de neuropsychologie expérimentale et d'imagerie ont obligé les chercheurs à réviser cette première hypothèse. Les anomalies fonctionnelles détectées sont en effet très souvent bilatérales, touchant les zones d'intégration sensorielle du cerveau. Par ailleurs, du point de vue cognitif, les perturbations des enfants autistes relèvent davantage de la communication en général que du code verbal en soi.

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Un autre candidat à l'hypothèse d'une « atteinte cognitive spécialisée » dans l'autisme est régulièrement mis en avant : il s'agit des capacités de « théorie de l'esprit », processus par lesquels l'enfant décode et interprète les attitudes mentales des personnes 1. On ne peut pas prédire le comportement des personnes si on ne sait pas ce qu'elles veulent, ce qu'elles pensent ou ont l'intention de faire. De très nombreux travaux expérimentaux montrent que les personnes autistes souffrent de telles difficultés de décryptage, ce qui perturberait grandement leur communication. Des études d'imagerie fonctionnelle menées sur ces populations montrent, en outre, une faible activation de certaines zones du cerveau (cortex préfrontal gauche et amygdale) lors de tâches impliquant l'attribution d'états mentaux. Toutefois, cette approche modulaire est critiquée sur deux points principaux : dans la mesure où ces compétences ne se développent semble-t-il que vers 4 ans chez l'enfant normal, d'autres facteurs que la maturation d'un module préprogrammé pourraient aboutir à ces perturbations ; de plus, l'atteinte d'un tel module n'explique pas d'autres dysfonctionnements plus élémentaires présentés par les enfants autistes au plan émotionnel ou perceptif.