En 1996, Jean Clottes et David Lewis Williams publient Les Chamanes de la préhistoire. Les deux archéologues y proposent une interprétation nouvelle de l'art des cavernes : celle d'un chamanisme préhistorique.
L'hypothèse a d'abord été formulée à partir d'une comparaison entre l'art des cavernes européen et celui des grottes ornées d'Afrique du Sud. En Afrique australe, l'art rupestre a des traits communs avec celui d'Europe. Sur les parois rocheuses, on y trouve des motifs similaires : des grands mammifères, des signes géométriques abstraits (traits, zigzags, quadrillages...), des mains négatives, des personnages mi-humains, mi-animaux, et plus rarement des représentations humaines 1. En Afrique australe, cet art est attribué au peuple des Bushmen San et s'est prolongé jusqu'à la période contemporaine, alors qu'il avait disparu en Europe depuis des milliers d'années.
A la fin du xixe siècle, des observateurs ont pu interroger des San qui pratiquaient encore cet art. Ces témoignages restèrent longtemps ignorés, jusqu'à ce que D. Lewis Williams s'y intéresse de près et en conclue que les peintures et gravures rupestres sont associées à des rites chamaniques. Le chamane est, dans les sociétés de chasseurs-cueilleurs, un personnage central. C'est lui qui entre en communication avec les esprits-animaux, lors de « voyages » effectués en état de transe. Grâce à son pouvoir, le chamane peut ainsi intervenir dans les guérisons, prédire l'avenir, appeler la pluie... L'état de transe est stimulé par le jeûne, de longues danses rythmées et la consommation de plantes hallucinogènes.