Les autistes : nouveaux enfants sauvages ?

Des programmes de traitement de l’autisme sont fondés sur une intervention intensive des équipes soignantes. Malgré cela, on ne parvient pas à sortir de l’autisme. Pourquoi ?

Jacques Hochmann ouvre sa remarquable Histoire de l’autisme (Odile Jacob, 2009) par le cas de Victor de l’Aveyron, le premier « enfant sauvage ». La comparaison est pertinente. Philippe Pinel, le père de la psychiatrie, l’avait bien vu dès 1800 : le jeune Victor avait plusieurs symptômes de ce que l’on appelait alors « l’idiotisme » : absence de communication, repli sur soi, crises de colère, gestes stéréotypés (balancements d’avant en arrière), arriération intellectuelle. Tous ces symptômes font penser à ceux qui caractérisent l’autisme. L’autisme infantile a été décrit pour la première fois par le psychiatre Leo Kanner (1894-1981) (1).

Voilà cinquante ans que les psychiatres s’interrogent sur les causes de l’autisme. Le temps n’est plus où l’on rendait responsable de l’autisme la « mère froide » qui n’avait pas su nouer de relations avec son bébé (2).

Il est admis désormais que l’autisme est lié à un dysfonctionnement cérébral, même si ses causes profondes restent énigmatiques. Le terme de « trouble neurodéveloppemental » et son intégration parmi les « troubles envahissants du développement » tendent à s’imposer. Ce changement de paradigme, suggère qu’un développement anormal du cerveau est à l’origine de l’autisme ; mais il faut admettre que l’on n’en sait guère plus. De nombreuses pistes ont été explorées jusqu’ici : piste neurologique, piste biochimique, piste génétique, piste cognitive, piste neuropsychanalytique (3). On ne sait pas vraiment quelles sont les causes profondes, ni a quel moment précis du développement surviennent les troubles.

La question du traitement met les parents, les thérapeutes et les autistes eux-mêmes face à une interrogation cruciale : l’autisme est-il une maladie que l’on peut espérer soigner ou un handicap que l’on doit chercher à compenser ? Malheureusement, la réponse est sans équivoque : on ne guérit pas de l’autisme.

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Concernant les traitements pharmacologiques, les anxiolytiques, les neuroleptiques et certains antipsychotiques sont utilisés pour calmer les crises d’angoisse, les comportements d’automutilation ou violents ainsi que les phases d’agitation extrême. Ces médicaments diminuent les symptômes mais ils ne prétendent pas guérir.

 

Les traitements psychothérapeutiques

La prise en charge a beaucoup évolué. Pendant longtemps, le sort des autistes se résumait à une alternative : la famille ou l’asile. A partir des années 1960-1970, on a vu se multiplier les services spécialisés en hôpitaux psychiatriques, même si le nombre de place a toujours été très inférieur à la demande. Puis à partir des années 1980, dans plusieurs pays, la donne a changé. La psychiatrie s’est désinstitutionalisée et l’on a ouvert les institutions vers l’extérieur : la famille, l’école, les centres éducatifs, le milieu du travail et la ville. L’autiste (et les malades mentaux en général) ne devait plus être confiné dans un service à tourner en rond entre sa chambre, les salles communes et le parc alentour. L’un des objectifs majeurs est désormais de permettre à l’autiste d’accéder à une meilleure autonomie et de s’insérer au mieux dans le milieu scolaire, familial, éventuellement du travail.