Les nouveaux visages de la propriété

De nouveaux modes de consommation circulaire cherchent à développer des boucles vertueuses, afin de réduire l’utilisation de ressources et d’énergie. Quelles sont leurs forces et leurs limites ?

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Le principe de transfert de propriété, concrétisé par un contrat de vente entre deux parties, est un des piliers de la société de consommation. Il est au cœur du système économique, définit les relations entre acheteurs et vendeurs et détermine la forme de la plupart des modèles de profit. Il est aussi l’un des déterminants de la construction de l’identité symbolique par la consommation, comme le résume le précepte « J’achète donc je suis ». Le transfert de propriété a par ailleurs un impact environnemental important. Le profit du vendeur est maximisé quand l’acheteur consomme un produit et le remplace le plus rapidement possible. De nombreuses dérives en découlent, notamment celle de l’obsolescence programmée, consistant à réduire délibérément la durée de vie des produits.

Des modes d’échange alternatifs se développent, comme celui dit du « simple accès ». Dans ce système, les consommateurs paient pour la simple utilisation du produit, son entretien et son remplacement en cas de panne. Il n’y a pas de transfert de propriété. Si la location n’est pas un phénomène nouveau, elle a longtemps été cantonnée à des produits spécifiques et à des usages occasionnels. Aujourd’hui, l’économie de l’accès pénètre peu à peu toutes les sphères de la consommation quotidienne. La location d'appareils d’équipement de la maison se développe rapidement avec des acteurs comme Orent, Homat ou LockandRoll. Le marché de l’équipement sportif expérimente également des changements de modèle d’affaires, comme l’enseigne Décathlon qui propose depuis cette année à ses clients de louer leurs produits par abonnement mensuel plutôt que les acheter. Il en va de même pour les transports, avec l’essor des solutions de mobilité partagée, le remplacement progressif de la vente par le leasing, ou encore pour la consommation de médias avec l’accès au contenu de plateformes de streaming, qui remplace quasi complètement la vente de DVD.

D’un point de vue environnemental, cette évolution est importante. La logique de profitabilité s’inverse : la rentabilité du fournisseur augmente quand le consommateur garde le produit le plus longtemps possible, que les pannes sont minimisées et que le remplacement est rare. La durée de vie du produit doit donc être maximisée. Néanmoins, ces modèles de location ne se sont pas développés aussi vite que certains experts auraient pensé il y a dix ans car il existe encore d’importants freins à lever pour encourager le développement de l’économie de l’accès : des freins culturels liés aux stigmas encore lourds de ne pas être propriétaire, des freins psychologiques liés à l’attachement aux objets, ou encore des freins économiques car l’accès revient encore la plupart du temps plus cher sur le moyen et long terme.