Les Kwakiutl font partie des stars de l’anthropologie. Ces Amérindiens, qui vivent sur la côte ouest du Canada (dans la région de Vancouver), sont connus pour leurs grands totems de bois sculptés, leurs impressionnants masques rituels et l’institution du potlatch, une grande cérémonie où on dilapide sans compter un grand nombre de biens (des couvertures, de la nourriture, des plaques de cuivre…).
Moins connu est le fait que les Kwakiutl, qui vivaient traditionnellement (jusqu’au début du 20e siècle) de pêche, de chasse et de collecte, forment des sociétés inégalitaires et hiérarchisées, composées d’une caste aristocratique, de « gens du commun » et d’esclaves.
Des aristocrates chez les peuples premiers ? Voilà qui prend le contre-pied d’une thèse longtemps admise selon laquelle les inégalités sociales n’apparaissent qu’avec l’essor d’une agriculture dont les surplus permettraient d’entretenir une caste d’improductifs.
De la noblesse chez les chasseurs-pêcheurs
Or chez les Kwakiutl, les chefs et leur famille forment bien une noblesse, détenant des titres, des richesses, et un pouvoir qui les dispense des tâches courantes, réservées aux gens du commun et aux esclaves : pêcher ou chasser, fabriquer les canots, bâtir ou entretenir les maisons ou coudre les vêtements.
Comme les aristocrates de l’Antiquité grecque ou romaine, les seigneurs du Moyen Âge ou les nobles de l’Ancien Régime, les membres de l’aristocratie kwakiutl se consacrent à des activités plus nobles : ils siègent au conseil des anciens, décident de la guerre ou de la paix, négocient avec les autres tribus (pour l’échange des peaux ou du cuivre), planifient la grande migration saisonnière et règlent les questions de justice.