Management, les nouvelles recettes indiennes

« Les salariés d’abord », « l’innovation frugale », 
de nouvelles méthodes de management venues d’Inde ont 
en commun de vouloir « renverser la pyramide sociale » 
et reconstruire l’économie par le bas. Mais pourquoi 
ces méthodes séduisent-elles tant les grandes entreprises ?

Dans les années 1980, les marques japonaises déferlaient sur l’Occident. Yamaha, Honda, Toyota, Sony, Toshiba, JVC perçaient sur les marchés occidentaux de l’électronique publique et de l’automobile. Par quel « miracle » avaient-elles réussi à rivaliser avec l’industrie occidentale ? Des missions furent envoyées dans les entreprises japonaises pour découvrir les secrets de production. C’est ainsi qu’on a découvert le « toyotisme » et ses dérivées : la méthode kaïzen, le kanban, le zéro défaut, les cercles de qualité, le lean production… Elles furent ensuite importées dans les entreprises occidentales.

On sait aujourd’hui que ces méthodes de management, bien qu’efficaces, n’étaient pas la panacée. Le lean production a commencé à montrer ses limites, autant en matière de performances que de qualité de vie au travail. Quant au zéro défaut, Toyota, premier constructeur automobile mondial, rappelait 2,3 millions de voitures en juin 2014, pour un problème d’airbag. Deux mois plus tôt, la marque avait déjà rappelé 6 millions de voitures dans le monde à la suite de divers problèmes techniques.

Les salariés d’abord !

Désormais, il faut chercher ailleurs les nouvelles recettes du succès. La Chine fait certes rêver les investisseurs pour son immense marché, mais nul ne songe à importer ses méthodes de production (qui sont celles de l’industrie européenne du siècle passé). C’est plutôt l’Inde qui fait parler d’elle en matière d’innovation managériale. L’Inde aurait inventé un mode de développement original : un développement « par le bas » s’appuyant sur les ressources et trésors de créativité des gens du peuple. C’est en tout cas ce que l’on lit depuis quelque temps dans les magazines économiques. Voilà aussi pourquoi des figures indiennes apparaissent dans les grands forums mondiaux où l’on débat de la façon de concilier la performance et le bien-être de l’humanité.

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Il y a quelques années, Muhamad Yunus, surnommé le « banquier des pauvres », faisait recette. Son action en faveur du microcrédit, destiné à aider les gens du peuple à créer leur propre business, lui a valu le prix Nobel en 2006. L’autre grande figure du développement par le bas est Amartya Sen, autre prix Nobel (d’économie). Selon lui, dès lors que l’on aide les pauvres à développer leurs potentiels (ou « capabilités »), on leur donne les moyens de se prendre eux-mêmes en charge (« empowerment »). Ces derniers temps, de nouveaux noms indiens apparaissent sur le devant de la scène. Qui sont-ils ?

Vineet Nayar, charismatique patron de l’entreprise de technologie HCL et tenant d’un nouveau style de management qui prétend « renverser la pyramide hiérarchique ». Il y a encore Navi Radjou, Jaideep Prabhu et Simone Ahuja, les trois auteurs du livre L’Innovation juggad 1. Chacun à sa manière illustre la même idée, en matière de développement et de management, la solution vient d’en bas.