Les économistes le connaissent pour avoir décroché le prix Nobel d’économie (1978), les sociologues des organisations le connaissent comme le théoricien de la « rationalité limitée », les spécialistes de sciences cognitives le considèrent comme le créateur, avec Allan Newell, du premier programme d’intelligence artificielle. Une même problématique unit tous ces domaines de recherche : comment comprendre les raisons de nos choix en situation vécue ?
Les décisions en situation
Herbert A. Simon s’est attaqué, depuis sa thèse de science politique (1943), à la fondation d’une nouvelle science : la science de la décision. Comment prendre une décision dans un univers incertain ? Quelle stratégie mentale adopter pour résoudre un problème ? L’épistémologue Jean-Louis Le Moigne, spécialiste de la systémique, a bien connu Simon. Il raconte que dans son étude, Simon partait d’un constat : « Pour élaborer leurs décisions, les administrateurs ne se conformaient absolument pas aux schémas appris à l’université et fondés sur le calcul des utilités marginales. Leurs comportements observés, bien que “raisonnés”, en général de façon satisfaisante, ne sont manifestement pas ceux décrits dans les manuels ! Les recherches de Simon portent donc sur le raisonnement humain en situation. Il se démarque ainsi des modèles formels utilisés par les économistes ».